Pourquoi soutenir l’initiative Minder

Sous la pression de l’initiative «contre les rémunérations abusives», le Parlement a élaboré une réforme ambitieuse du droit des sociétés anonymes, impensable il y a cinq ans encore. A l’issue du processus, des divergences sensibles subsistent entre les deux options. Le peuple suisse tranchera le 3 mars 2013.

ACTARES a examiné les deux options soumises à la sanction des urnes: permettre l’entrée en vigueur du nouveau droit, élaboré par les chambres, régissant les entreprises cotées en bourse en refusant l’initiative lancée par Thomas Minder, ou alors accepter celle-ci et attendre sa mise en œuvre. Une pesée minutieuse des avantages et inconvénients a fait pencher la balance en faveur du «OUI» au texte populaire.

Le filet de sécurité

Les travaux parlementaires constituent un contre-projet indirect à l’initiative. Ils ne feront pas l’objet de la votation, et par conséquent un double refus n’est pas possible le 3 mars 2013. Quelle que soit l’issue du scrutin, un pas de géant aura été fait sur le chemin du renforcement des droits des actionnaires. Car si un référendum est formellement possible, on ne voit pas qui s’enhardirait à le lancer, et encore moins qui le signerait.

Des différences paradoxales

Une partie des différences qui subsistent entre l’initiative et le contre-projet s’expliquent par des manières différentes d’aborder la question. Le Parlement a rigoureusement axé ses travaux sur le contrôle des rémunérations. Il a par exemple donné à l’assemblée générale la compétence d’approuver le règlement de rémunération, dont le contenu est décrit de manière précise. La même précision s’applique au rapport de rémunération.

Paradoxalement, Thomas Minder, au travers de son initiative, a d’abord mis l’accent sur le gouvernement d’entreprise, partant du principe qu’en obtenant davantage de pouvoir les actionnaires seront en mesure de juguler les rémunérations. Il a prévu de manière contraignante l’élection annuelle du conseil d’administration et de sa présidence, de la commission des rémunérations ou encore de la représentation indépendante. L’obligation pour les caisses de pensions de voter et de publier leurs décisions découle de ce même principe.

Virage électronique raté

Les dispositions consacrées au vote électronique lors des assemblées générales constituent le ratage le plus criant de la proposition parlementaire. Les actionnaires ont aujourd’hui la possibilité d’exercer ce que l’on pourrait appeler le «vote par correspondance», au prix d’une procédure parfois compliquée (voir p. 4). Alors que l’initiative formule simplement l’exigence du vote électronique à distance qui pourrait simplifier la situation, les Chambres ont choisi d’accumuler les conditions à sa mise en œuvre, jusqu’à le rendre impraticable. Il s’agit là d’un retour en arrière.

Confiance contre garanties

Le texte de l’initiative contient plusieurs dispositions contraignantes afin que ses prescriptions ne puissent pas être contournées, ainsi qu’un volet pénal. Le contre-projet n’a pas du tout pris cette direction, ce qui est révélateur de deux états d’esprit bien différents. Du côté du Parlement, on fait appel à la confiance et à la concordance, à tel point qu’Economiesuisse se range officiellement derrière la révision de la loi. Du côté de Thomas Minder, ce sont des garanties qui sont exigées. La plus forte de ces garanties, c’est l’ancrage dans la Constitution fédérale des nouveaux droits dévolus aux actionnaires. A l’avenir, tout retour en arrière sans consultation populaire sera exclu.